Die another day

Toute aventure commence par un premier pas. Je sais, cela fait assez cliché, mais reste néanmoins tout à fait approprié.

En l'occurence, le premier pas fait référence à celui que vous effectuez en montant dans l'express, prêts pour vos vacances, vos affaires ou pour toute autre raison qui vous mènent vers Miami.

Voyage parfait, rien à redire, les voitures sont confortables, les places spacieuses, et à part l'affreux marmot qui braille comme un porc quelques sièges plus loin, et l'ado boutonneux qui s'écoute du Shakira, tout se passe au mieux. Tout à coup, le verre sur la tablette se met à vibrer... un peu, puis c'est au tour de la tablette de se mettre à vibrer... Vous voyez vos voisins ouvrir la bouche mais avant que le moindre son n'en sorte....

...

Vous tombez dans un trou sans fin, à la poursuite du lapin blanc.

...

Des cris, de la lumière vascillante, semblant provenir du ciel, un bruit assourdissant, vombrissant. Un appel émane, proche de vous Ici, encore un...

...

Vous retombez dans une nuit d'éternité

...

Vous nagez dans une mer sombre, bercé par les vagues quand un bruit lointain, semblable à un réveil matin électrique irritant, se met à sonner. Le bruit se fait de plus en plus insistant jusqu'à vous blesser les tympans. Le bruit de vague se transforme peu à peu en bruit de siphon. Il devient si fort qu'il en couvre même le bruit du "réveil-matin".

Impression de noyade, de chute sans fin.

Les poumons brûlant, les yeux embrouillés, nauséeux comme le lendemain de veille, vous vous réveillés par terre dans une grande pièce baignée dans une lumière bleu malsaine vascillante. Vêtus d'un caleçon large pudique (encore que présentement, la pudeur soit le dernier de vos soucis, modèle bikini pour le sexe faible), vous remarquez que vous gisez sur une grille, baignant dans un liquide visqueux inodore.

Vos sens vous reviennent peu à peu et vous remarquez d'autres silhouettes à vos côtés, l'air aussi peu frais que vous. Les détails des environs se fixent dans votre mémoire. La pièce semble être aussi grande qu'une salle de gymnastique scolaire, des néons éclairent faiblement les lieux (de nombreux semblent morts), deux portes, mais ce qui vous frappe le plus, ce sont ces grandes colonnes transparentes desquelles émanent cette couleur bleue électricité, ces colonnes espacées d'un mètre... ces colonnes dans lesquelles vous distinguez des silhouettes à l'aspect humain, étranges poissons flottant dans ces non moins étranges aquariums.

- Oh nom de dieu...

Ivry grommela en portant une main lourde à son front. Le sang cognait sourdement à ses tempes. Elle battit des paupières plusieurs fois, grimaça en étudiant les environs. Presque fascinée, elle étendit sa main devant elle, et contempla l'évolution lente du liquide visqueux le long de son bras. Les sensations étaient bien trop réelles pour qu'il s'agisse d'un cauchemar, et pourtant il aurait été plus simple de le cataloguer ainsi.

Sortant peu à peu de sa torpeur, elle se redressa, faillit glisser sur l'appui malhabile de ses bras, et étouffa un juron. Encore quelques secondes incrédules à observer la salle, avant de s'exclamer plus fermement:

- NOM DE DIEU!

Elle chercha à rencontrer le regard de silhouettes allongées à ses côtés, un éclat de panique dans le regard.

- Eh! Eh, les gars! Je... C'est quoi ce bordel?

Elle s'approcha à quatre pattes de l'homme le plus proche, et lui saisit le bras. Ce simple contact avec un autre être humain la rassura un peu. Elle n'était pas seule, c'était déjà ça.

- Eh! Oh! Vous êtes pas mort, au moins?

Le roux émit un petit toussotement de ceux que l'on a après avoir avalé la moitié de la méditerranée, suivi d'un rale un peu plus expressif sur sa condition physique. Il avait toujours été malade en voiture, et avion et en train, mais la, son estomac semblait vouloir imploser. La légere pression de la jeune fille le ramena a la réalité; Un frisson lui parcourut l'échine, lorsqu'il aperçut qu'il se faisait tater par une créature féminine. Il se désengagea brusquement, émettant un grognement canin, avant de réaliser qu'il était en maillot de bain. Fort moche, mais un maillot de bain quand même.

"T'es qui toi ? " assena t il, sur la défensive.

Puis, il leva les yeux, et contempla les cuves; sa machoire aurait pu se décrocher devant l'étrange spectacle et l'ambiance si glauque du coin.

Il se redressa, ignorant la jeune femme, s'étira et vérifia qu'il n'avait rien de cassé.

Le jeune homme gardait les yeux fermés, tentant de se concentrer quelques instants afin de se remémorer ce qui s'était précédemment passé.
En vint, il ne réussit qu'à se donner une migraine affreuse, il ouvrit donc les yeux pour se rendre compte qu'il avait encore tout ses membres à leur place, il en avait douté un instant.

Voyant les deux personnes déjà réveillés, il se déplaça le plus silencieusement possible (en manquant de glisser deux ou trois fois) derrière les cuves pour se cacher.

Ah mais c'est quoi ces trucs dégoutants?!

Dit-il en apercevant les cuves, brisant par la même occasion toute chances de se faire discret. Il décida donc de faire ce qu'il savait faire de mieux, improviser, et s'adressa à la jeune fille plutôt qu'à celui qui ne semblait pas apprécier avoir de la compagnie.

Héhé euh... bonjour belle demoiselle, ce maillot vous va à ravir, dites-moi donc j'ai quelques interrogations au sujet de ce lieu, ne serions-nous pas le lendemain d'une fête un peu trop arrosé chez quelqu'un qui manque cruellement de goût en terme de décoration? En tout cas ces lugubres aquariums sont très réalistes si c'est le cas.

Voyez-vous, et notez bien que ce n'est pas facile pour moi de l'avouer, j'ai probablement du abuser sur l'alcool car le seul souvenir qui me revient des dernières heures est un migraine atroce.

Ivy esquissa un sourire à l'attention de l'homme qui l'avait interpelée. La réaction du rouquin l'avait un peu refroidie, et cela lui faisait plaisir de pouvoir adresser la parole à quelqu'un de plus accessible... Même s'il était complètement bizarroïde, et utilisait un langage ampoulé parfaitement démodé. Elle lui sourit tout de même bravement, tout en se redressant enfin sur ses jambes, en équilibre précaire sur le sol visqueux.

- Si je m'étais mis une mine, je m'en serais souvenue. Mon dernier souvenir, c'est que j'écoutais mon mp3 dans le train en route pour Miami, et maintenant ça... Alors soit je me suis endormie sur la fin du voyage, et Miami a drôlement changé, soit... Je sais pas. C'est juste... glauque.

Une fois assurée de conserver la station debout, elle s'entoura de ses bras et tourna lentement sur elle-même pour s'imprégner de la vision des lieux. L'éclat des cuves la fit frissonner.

Répondant avec retard à la question du bougon, elle se tourna à nouveau vers lui.

- Ivy. Je m'appelle Ivy, et si c'est une mauvaise blague, j'ai très envie qu'elle s'arrête. L'un de vous a signé pour un jeu de télé-réalité débile, ou quoi?

La télévision! C'était une idée. Tout ça pouvait ressembler à une mise en scène macabre, et ferait certainement une bonne audience. Avec ce qu'on pouvait voir comme stupidités sur le petit écran, ça ne l'étonnerait pas plus que ça. Aussitôt, elle se mit à passer en revue ses connaissances assez tarées pour l'inscrire à ce genre de spectacles. Elle connaissait quelques idiots, mais à ce point, ça la dépassait.

Je n'ai jamais eu besoin de jeux pour gagner quelque chose, et puis franchement je ne vois pas qui pourrait m'inscrire, je voyage trop pour que ça soit possible.

Au fait je m'appelle... Damien, Damien Kelen. Je suis un médecin renommé de la haute société qui traite surtout les maladies rares, aussi je n'irais jamais perdre mon temps dans ce genre d'endroit de mon plein grès, hormis pour une fête.

Il s'approche d'une cuve l'air intrigué.

J'irais bien casser l'une de ces cuves afin de m'assurer que nous sommes acteurs d'une scène bien ridicule... Mais ce n'est vraiment pas mon genre, quelqu'un aurait assez de curiosité pour faire ainsi? Je peux toujours aller chercher de quoi faire mais j'ai bien peur d'avoir... la vision un peu floue après ce dur réveil.

Il se massa doucereusement le crane. Son poil ras lui picotait la paume de la main, mais il n'y prêta guere attention, absorbé qu'il était a se remémorer ses souvenirs, et comment il avait pu atterrir ici. Et pourquoi il était en maillot avec des imbéciles, plutot que dans l'une de ces cuves. La voix de la jeune fille le ramena a de plus basiques pensées.

"Oué... La télé ? J'ai même pas la télé. Un ramassis de connerie tout ca. Pas un pet d'information valable. "

Il regarda attentivement le nouveau venu. Il avait l'air bavard. Il décida de l'ignorer le plus longtemps possible. Il se rapprocha d'une cuve, contemplant plus attentivement ce qui la remplissait. (une petite description plus précise ?)

Le punk reprit conscience et tenta de se lever, mais fut rapidement stoppé par un énorme mal de crane. Il s'assit donc et quand il fut bien réveillé observa la pièce ou il était en marmonnant:

-...Ça ressemble a aucun squat de je connais et généralement il n'y a d'aquariums dans les concerts ou je traine... et généralement il y a pas de gens des les aquariums...Comment j'ai fait pour atterrir la moi.

Il réussit a lever et voyant le petit groupe de personnes se dirigea vers eux en titubant et en se tenant la tête.
Arriver près d'eux, il fit une grimace de douleur avant de dire dans un soupir:

-C'est quoi ce putain de délire...

C'était sans doute la réaction la plus censée qu'on pouvait avoir, et Ivy en fut immédiatement reconnaissante à l'inconnu style punk attardé.

- Apparemment, aucun de nous ne sait ce qu'on fout là. L'un de vous a vu une sortie?

Jeu télé ou pas, elle n'avait aucune envie de rester dans le coin. Elle commença à longer lentement les murs pour être certaine de ne manquer aucun passage dissimulé.

Ivy n'osa ouvrir aucune porte si elle n'était pas sûre que ses compagnons d'infortune la suivraient. Elle se contenta donc de noter silencieusement leur emplacement, sans même oser les faire pivoter sur leurs gonds. Et un petit fond de curiosité la titillait... Elle n'avait pas encore tout vu, ici.

Elle resta plongée quelques instants dans ce débat intérieur entre son désir de foutre le camp et son envie de savoir de quoi il s'agissait. Machinalement, elle se rapprocha de l'endroit où elle s'était réveillée. Est-ce qu'elle s'était trouvé enfermée dans une de ces cuves, elle aussi? Six cuves. Cinq personnes. Est-ce qu'il manquait quelqu'un?

Elle jeta un oeil presque distrait au terminal, avant de l'étudier plus longuement. Ses boyaux se tordirent tandis qu'elle analysait la suite de nombres. Si son raisonnement était exact, le terminal lui indiquait qu'elle était en 2131.

L'année, le mois, la date, l'heure. 13 septembre 2131.

Elle déglutit. Impossible. Elle devait se planter.

- Euh... Les gars? On était... on était dans ces cuves, là? C'est les nôtres, c'est ça? On était enfermés comme les autres? Et euh...

Elle posa son index sur le terminal.

- Et hop, "procédure de réanimation"?

Elle garda un silence incrédule, avant de demander d'une voix plus fatiguée:

- Vous devriez jeter un oeil sur ce truc, vraiment.